HDSMAG67
2 maga z i ne | HDS mag | n°67 - septembre-octobre 2019 HDS Existe-t-il, selon vous, une « fracture numérique » ? JFM Le terme de fracture numérique ne convient pas car très souvent, le numérique agit demanière ambivalente sur les autres fractures principales de la société comme les inégalités économiques, sociales, l’accès à la connais- sance, les écarts générationnels, la relation au territoire ou aux services, etc. Au fil des années, cette question est devenue plus complexe. Pour moi, dire qu’il y a d’un côté des gens qui sont « dans le coup » et de l’autre des retar- dataires pose problème. Cette vision des choses stigmatise des personnes qui ont des problématiques très différentes. Nous avons tous des difficultés avec le numérique et, de manière paradoxale, plus nous avons d’usages du numérique, plus nous avons de soucis avec lui car se posent alors les ques- tions de l’archivage de nos données, de nos mots de passe à mémoriser ou de la sauvegarde sur notre cloud … HDS Avec la Fing, vous avez mené le projet Capacity autour des inégalités sociales du numérique. Un des constats de votre étude est qu’il est difficile de fonder ces inégalités sur des critères géné- rationnels… JFM À tous les âges, il existe différentes typologies d’usagers du numérique. Il y en a qui en ont une pratique intensive, qui possèdent une véritable culture numérique et à l’autre extrême, des gens pour qui tout cela est très loin parce que ils ont déjà une vie sociale et n’ont pas besoin d’en rajouter. Il y a effectivement des formes d’hyperconnexion chez les jeunes mais comme il y en a aussi chez toutes les personnes très socialisées dont les jeunes seniors. Évidemment, statistiquement, vous allez avoir un peu plus de personnes âgées qui disent avoir du mal avec le numérique. Mais ces difficultés sont toujours liées au contexte. En creusant un peu, on se rend compte qu’un jeune peut ne pas être si à l’aise que ça avec un moteur de recherche, pour réserver un billet de train ou pour trier les fake news alors qu’il saura très bien se servir des réseaux sociaux. Du côté des seniors, ce qu’on observe souvent, ce n’est pas tant une incapacité vis-à-vis de l’outil qu’une angoisse par rapport aux codes. Ils ont peur de se tromper, de ne pas être dans la modernité. C’est plus d’ordre symbolique que de la capacité d’usage. HDS L’exclusion numérique est-elle aussi une question de moyens financiers et donc de classe sociale ? JFM Là encore, les questions économiques et sociales ne sont pas simples. Certaines familles modestes sont mieux équipées que les plus aisées, les des difficultés avec le numérique Nous avons tous Pour Jacques-François Marchandise, délégué général de la Fondation pour un internet nouvelle génération (Fing), l’exclusion numérique ne touche pas seulement les personnes âgées et défavorisées.
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