HDS mag 66
juillet-août 2019 - n°66 | HDS mag | en t r e t i en La maquette initiale de Dubuffet mesurait un mètre de haut. bien fidèle au projet de Dubuffet ? RD C’est tout l’intérêt du pantographe : l’aiguille palpe les volumes avec un système de résistance qui taille tous les deux centimètres pour la plus grande trame de l’agrandissement. Et en ce qui concerne les peintures, les traits que nous voyons sont les mêmes que ceux que Dubuffet avait dessinés. HDS Comment l’aviez-vous rencontré ? RD Je me voyais en train de faire de la peinture et puis voilà, ça a dégénéré (rires). C’était l’époque formidable où l’on trouvait du travail tout de suite. Je sortais de l’école et revenais de l’armée quand on m’a proposé de travailler avec Dubuffet et j’ai accepté. Je le connaissais mais j’ai été très long à rentrer complètement dans son œuvre. On peut trouver ça naïf, décoratif alors que ce n’est pas du tout ça : c’est le génie, tout simplement… HDS Au final, votre collaboration a été plutôt productive… RD Nous avons fait quarante sculptures ensemble. J’ai fait partie de son atelier de 1968 à 1977 avant de créer mon propre atelier de décors. Il m’a recontacté ensuite pour d’autres sculptures et nous n’avons plus arrêté de travailler ensemble. À la mort de Dubuffet, la Fondation a été créée avec comme objectif de réaliser les agrandissements des maquettes qu’il avait prévus. Je les ai pratiquement tous fait même s’il en reste d’autres aujourd’hui, certes moins « impactants » que la Tour aux figures … HDS La Tour aux figures se voit de loin mais se visite également. Est-elle un monument ou une œuvre d’art ? RD Dubuffet disait que cette tour est une peinture qui se développe dans l’espace, surtout à l’intérieur. On ne peut y vivre, ce n’est pas du tout utilitaire. Si l’on se promène dans la Closerie Falbala , une autre de ses œuvres, on perd toute notion de la vie extérieure. Il n’y a plus de nature, plus rien. Uniquement la sculpture et ses tracés. C’est le cas ici aussi : quand on se trouve à l’intérieur, à chaque étage de ce « Gastrovolve », on n’a plus d’impression de gravité. Dubuffet disait également que le monde dans lequel on vivait il y a cinquante ans n’était pas forcément le bon. Ses œuvres étaient donc des tentatives de bâtir un autre monde. HDS Près de trente-cinq ans après sa mort, quelle trace Dubuffet a-t-il laissé dans le monde de l’art ? RD Dubuffet plaisait, je crois, plus aux Américains qu’aux Français. La filiation se trouve, pour moi, chez des artistes comme Jean-Michel Basquiat ou Cy Twombly, des intellectuels qui puisent leur inspiration du travail de Dubuffet, dans l’art de rue, le graffiti et l’art brut. Propos recueillis par Mélanie Le Beller CD92/W illy L abre
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