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a c t u a l i t é
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n°36 - juillet-août 2014
HDS
Quand on vous a annoncé
en mars que vous étiez le
lauréat du Prix Pritzker cette
année, vous avez répondu que
c’était trop tôt. Pourquoi ?
SB : Je ne m’y attendais pas.
Contrairement à mes prédéces-
seurs, je ne suis pas l’auteur de
grandes réalisations. J’ai donc pris
cette récompense non pas comme
la reconnaissance d’un accom-
plissement professionnel, mais
comme un encouragement.
HDS
Votre travail semble diffi-
cilement classable Avez-vous
été influencé par d’autres
architectes ?
SB : Bien évidemment. Il y a eu
tout d’abord mon professeur à la
Cooper Union School of Archi-
tecture de New York John Hedjuk.
Puis Arata Isozaki dont j’ai été
l’assistant après mes études. J’ai
aussi collaboré avec un archi-
tecte allemand, le professeur
Frei Otho. Si la plupart des archi-
tectes sont influencés par les
tendances, les courants de leur
époque – que ce soit baroque,
gothique,
post-moderne
ou
peu importe – d’autres suivent
leurs propres règles. Frei Otho
fait partie de ces architectes-
là, ceux inventent leur propre
matériau ou leur propre structure.
J’ai toujours rêvé de faire partie de
ces architectes à part.
HDS
Justement, vous êtes
connu pour vos structures en
tubes de carton. Comment
vous est venue cette idée ?
SB : J’ai eu cette idée en 1986 en
travaillant sur la scénographie d’une
exposition consacrée à Alvar Aalto,
un architecte et designer finlandais
dont je suis un grand admirateur.
C’est aussi un des architectes qui
m’ont beaucoup influencé. Pour
cette exposition, je voulais dessiner
quelque chose qui lui ressemblait.
Mais faute de budget suffisant, je ne
pouvais pas utiliser le bois, un des
matériau de prédilection d’Aalto.
J’ai donc cherché une alternative, un
matériau ressemblant mais moins
cher et plus facile à travailler. C’est
là que j’ai pensé aux tubes de carton
faits à partir de papier recyclé.
HDS
Avec ce matériau, vous
avez construit de nombreux
bâtiments dans des zones
dévastées. Certains auraient
dû être temporaires. Mais ils
sont toujours debout…
SB : C’est une question très
intéressante qui m’est apparue
avec la construction de l’église
de Kobe au Japon après le
tremblement de terre de 1995.
Cette « Paper Church » construite
en quelques semaines était
temporaire. Elle devait durer
trois ans environ. Mais les gens
l’appréciaient tellement qu’elle
est restée debout dix ans. Quand
les autorités ont décidé de recons-
truire l’église en « dur », nous
avons décidé de démonter la
« Paper Church » et de la trans-
porter à Taïwan où il venait d’y
avoir un tremblement de terre.
Même les bâtiments faits de
tubes en carton peuvent donc
être permanents. À l’inverse,
beaucoup de bâtiments en béton,
construits uniquement pour
faire de l’argent, sont tempo-
raires. Quand ils ne servent plus
à rien, qu’ils ne rapportent plus
assez, ils sont détruits et
remplacés. Le fait qu’un bâtiment
soit temporaire ou permanent ne
dépend donc pas du matériau
dans lequel il est construit mais
du fait que les gens l’aiment
ou non.
Shigeru Ban est, avec Jean de Gastines, le co-architecte de la future Cité
musicale départementale
. Entretien avec le lauréat 2014 du Prix Pritzker,
l’équivalent du Nobel pour l’architecture.
La Cité musicale
départementale sera
un monument et non pas
un simple bâtiment
jouer
L’architecte
un rôle
social
doit
votre
tablette numérique
et
video.hauts-de-seine.net
Retrouvez l’interview
de Shigeru Ban sur
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