pho t og r aph i e
juillet-août 2014 - n°36
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hds.
mag
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7
A
vec
Les âmes grises :
récits photographiques
d’après-guerre
, la 3 e
édition du festival
Allers-Retours montre combien
le travail de mémoire se construit
par l’image. Après avoir exposé
en mai et juin les images des
photographes évoquant « l’étape
post-traumatique » – quand les
témoins réussissent à parler –
avec Jonathan Torgovnik, au
Rwanda, et Rita Leistner,
au Liban, le festival présente
durant l’été le travail de quatre
autres photographes sur la
question de la représentation
du récit collectif.
Du 1 er juillet au 10 août, Laetitia
Tura et Camilla de Maffeï ont
chacune mené l’enquête sur le
terrain. La première en Espagne,
la seconde à Sarajevo. Laetitia
Tura s’est attachée à faire
revivre la mémoire de milliers
d’Espagnols, fuyant en 1939
le franquisme et la guerre
civile. En lieu et place d’un
récit commun, cet exil massif
connu sous le nom de
Retirada
n’est aujourd’hui matérialisé
que par des archives papier et
par la topographie d’un paysage
où l’on peut voir la trace des
camps, le long de la frontière
des Pyrénées. Parallèlement,
Camilla de Maffeï a travaillé sur
le mont Trebevic, à Sarajevo, le
site même des Jeux olympiques
de 1984. Occupé en 1992 par
les troupes serbes bosniaques,
ce paysage est aujourd’hui une
sorte de
« frontière entre les groupes
ethniques »
. La désolation règne
ici, la population est abandonnée
à son sort. Dans les deux cas,
l’histoire de la guerre reste à écrire.
Registre sacré
Du 12 août au 14 septembre,
Vasantha Yogananthan et Émeric
Lhuisset abordent quant à
eux l’étape suivante : celle de
l’expression de la mémoire
partagée et codifiée et de sa repré-
sentation. Lorsque s’imbriquent
« l’histoire individuelle et l’histoire
des autres »
, l’expression de
cette
mémoire
participe
d’un « registre du sacré » qui
Le festival de photographie contemporaine en plein air
du musée Albert-Kahn déroule jusqu’au 26 octobre
ses huit reportages traitant de « l’après-guerre ».
conduit à ritualiser le récit, qu’il
s’agisse des
Théâtres de guerre
élaborés par les Tamouls franci-
liens dont Vasantha Yogananthan
a recueilli par l’image les récits,
ou des
Théâtres de conflit
que
met en scène Émeric Lhuisset.
Ce dernier place les soldats kurdes
du Komala (opposés à l’Iran)
en posture d’« icônes », cette
distanciation lui permettant de
donnerunedimensionuniverselle
à la représentation.
n
Alix Saint-Martin
Les âmes grises : récits photographiques
d’après-guerre, jusqu’au 26 octobre
2014. Catalogue disponible. Tarifs : 4
€
;
2,50
€
; du mardi au dimanche, 11 h - 19 h,
ouvert jours fériés.
allers-retours.hauts-de-seine.net
et théâtres
Âmes grises
de guerre
©
camilla
de maffeï
Bucheron.
Mont Trebevic, Sarajevo - Bosnie Herzégovine, 2010