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HDS
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n°40 - mars-avril 2015
être reçu à l’Académie comme
peintre de natures mortes sur la
présentation de deux tableaux au
choix. Or il livre le 1
er
août 1699
un chef-d’œuvre, l’Autoportrait en
chasseur, conservé au musée du
Louvre
». On peut y découvrir
Desportes fusil à la main, qui
défie du regard les Académiciens
en associant son propre portrait
à une nature morte (lièvre,
canard, perdrix) et à des animaux
plus vivants que nature (chiens
de chasse), le tout sur fond
de paysage ! Peu prisée en France
avant 1660, la longue tradition
flamande des natures mortes
et de la peinture animalière se
trouve louée par l’Académie vers
la fin du XVII
e
. En 1699, Mansart
nomme le théoricien Roger
de Piles « conseiller honoraire »
à l’Académie. Ce tenant du
rubénisme infléchit alors le
débat esthétique en faveur du
coloris dans la querelle du dessin
et de la couleur. Desportes entre à
l’Académie au bon moment...
L’art de la chasse
Au sommet de la hiérarchie qui
organise la société de l’Ancien
Régime se trouve le Roi
lui-même et sa vie quotidienne.
Louis XIV préfère Versailles au
Louvre, il aime le plein air, l’art
des jardins et par-dessus tout
l’art aristocratique de la chasse,
à la fois tradition et privilège.
Chasseur passionné comme
tous les Bourbons, le Roi-Soleil
s’adonne le lundi et le jeudi à son
loisir favori qui, avant tout autre
genre pictural, est digne d’être
représenté dans une demeure
royale. Les décors cynégétiques
envahissent les maisons de
chasse du Roi, en premier lieu
Marly, Trianon. Saint-Simon
relate comment les nobles
«
faisaient leur cour en offrant au
souverain des chiennes couchantes
fort belles et bien dressées
»
car Louis XIV voue «
un amour
immodéré à ses chiens
».
Au cours de ses chasses, Desportes
dessine sur le vif les attitudes de la
meute royale qu’il donne ensuite
à choisir au roi. C’est ainsi qu’il
devient le peintre des chasses
royales et le portraitiste des
chiennes préférées de Louis XIV.
Il applique à l’art animalier les
qualités d’expression requises par
le genre du portrait et hisse ainsi
la peinture animalière à ce rang.
Mais Desportes n’entend pas
se consacrer uniquement à
la peinture animalière. Ses
ensembles
décoratifs
inclus
dans des boiseries relèvent ainsi
du grand goût français. «
Il y a
chez Desportes cette belle emphase
française où la rhétorique joue un
rôle
», observe Dominique Brême.
Puisant dans le répertoire de
l’Europe du Nord, Desportes se
fait une spécialité des tableaux
de « grands buffets », autrement
dit des natures mortes disposées
sur des tables de marbre, où
le gibier jouxte les pièces d’orfè-
Nonette à l’arrêt,111.
Pierre noire, sanguine
CG92/O
livier
r
avOire