pano r ama
À travers une soixantaine d’œuvres, la Maison des Arts d’Antony, avec l’aide du Centre culturel algérien,
nous invite jusqu’au 2 avril à la découverte de
L’art algérien entre deux rives
.
I
l y aurait beaucoup de manières de présenter les
Traces
de Lydia Tokic, présentées au centre culturel
Max-Juclier de Villeneuve jusqu’au 4 mai.
En commençant par rejeter le jargon incompréhensible
qui n’aurait en l’espèce que le pouvoir de nous éloigner
d’une artiste qui recherche la proximité. D’ailleurs, originaire
de Côte d’Ivoire, elle ne se présente pas aussitôt comme
une artiste, mais évoque plutôt un parcours lié à l’anthropo-
logie, à l’économie de la récupération et à la mémoire familiale :
«
Mon cheminement professionnel et personnel me remet sur cette
route qui m’habite, la route de mes origines.
» L’art plastique selon
Tokic, c’est le carton – qu’elle récupère et qu’elle travaille
comme d’autres le bois ou la terre. Surfaces scarifiées, masques
des ancêtres, coquillages bruts : l’exposition nous fait remonter
un chemin de notre époque, entre sculpture peinte et objet
décoratif, qui use pour nous conduire ailleurs du déchet
urbain et des impressions d’Afrique.
n
www.villeneuve92.comMéditerranée
Carton
plastique
mars-avril 2017 - n°52
|
HDS
mag
|
L
’exposition est distribuée sur deux niveaux, comme si deux
époques cohabitaient sans vraiment se confondre, dialo-
guaient sans réellement fusionner, comme si l’on passait,
par la grâce d’un escalier, d’une Algérie à l’autre. À l’étage,
celui des maîtres, les pionniers : Abdelkader Guermaz (1919-1996) et
Mohamed Aksouh (né en 1934) s’installent en France dans les années
soixante assoiffés de la modernité de l’Europe d’alors. «
Peintre
du silence et de la lumière
», Guermaz glisse du paysage à l’esprit
de celui-ci, dans une méditation discrète qui ne renonça jamais à
la gourmandise de la couleur. Aksouh est peintre des bleus et des verts
assourdis de la mer profonde, des gris et des ocres des villes imagi-
naires. On entendrait presque leurs dialogues avec de Staël et Vieira
da Silva.
Au rez-de-chaussée, à ras du réel, les trois plasticiens, Habib Hasnaoui
(né en 1955), Mustapha Sedjal (né en 1964) et Kamel Yahiaoui (né en
1966) ont rejoint les rivages nord de la Méditerranée dans les années
quatre-vingt-dix, lors de cette «
décennie noire
» qui fut un autre
tremblement de la terre d’Algérie. Les matériaux se diversifient,
la vidéo et les photographies nourrissent une approche plus concep-
tuelle, les trois «
passent au crible les réalités sociales ou politiques
». Le cri
de Picasso à Guernica résonne encore dans leur mémoire, comme
les détournements deDuchamp ou les fulgurances de Beuys. Et l’on se réjouit
de vérifier, chez nos voisins méconnus comme ailleurs, que l’art n’en finit
jamais de proliférer une fois que s’est brisé le vase clos.
n
www.ville-antony.fr/expo-maison-des-arts
© L
ydia
T
okic
© SV
éronique
E
llena
© M
ohamed
A
ksouh