r epo r t age
mai-juin 2014 - n°35
|
hds.
mag
|
A
u programme de la
leçon du jour, le
passé composé et
l’imparfait. Sur le
tableau blanc, les phrases
s’enchaînent. Dans la salle, une
dizaine de femmes, livres et
cahiers posés devant elles.
Certaines ont encore le français
un peu hésitant mais peu à peu, le
cours de conjugaison dérive, et les
élèves improvisent un débat sur le
mariage pour tous et la théorie du
genre. «
La prise de parole est un
élément sur lequel on travaille
beaucoup. C’est important pour leur
recherche d’emploi, quand ils vont se
présenter face à un recruteur
»,
explique Élisabeth Clément, la
formatrice. Face à elle, ses élèves
viennent des quatre coins du
monde : Amérique du Sud,
Afrique, Europe de l’Est… «
Ils ont
des diplômes, du bac jusqu’à bac +4
dans leur pays. Il y a une très bonne
entente entre eux, ils s’aident
mutuellement, ils ont des parcours de
vie différents. Je leur donne beaucoup
de travail personnel, tout en leur
laissant du temps.
» Dans un coin
de la salle, Geneviève est attentive.
Depuis deux ans, elle bénéficie
des cours de la Maison des
Femmes. Elle a passé et obtenu sa
formation bureautique l’année
dernière et entame cette année
des cours de français. Pour elle, il
s’agit d’un retour en France,
quarante ans après y être arrivée
du Cameroun pour suivre des
études de tourisme. «
Je suis
retournée en Afrique pour y
travailler et je suis revenue il y a
quatre ans. J’ai mes deux filles
ici…
» À soixante ans, Geneviève a
encore plein de projets en tête et
la soif d’apprendre. «
J’ai besoin
d’avoir un bon niveau en français,
afin de combler mes lacunes à l’écrit.
Prendre des cours ici me donne de la
confiance, pour pouvoir m’intégrer. À
terme, je voudrais créer une
entreprise autour du pagne africain,
un tissu à partir duquel on peut
f a b r i q u e r p l e i n d e c h o s e s ,
notamment pour la décoration.
»
Apprendre pour mieux s’insérer
dans la société, tel est le credo de
la Maison des Femmes. Créée par
l’association éponyme en 1994,
la structure a vu des centaines
de femmes passer sur ses bancs.
Zakia Mzili-Couderc, la directrice,
est là depuis le début. Plus qu’une
maison, elle voit le lieu comme
une «
école
», destinée à porter
« [son]
combat : la promotion de la
femme pour lui donner un projet de
vie et l’aider à se positionner dans
la société. J’ai toujours milité pour
l’alphabétisation de la famille. Lire
et écrire, c’est le début d’une vie !
»
C’est au cœur du quartier des
Hauts d’Asnières que la Maison
des Femmes s’est implantée. «
Il
s’agit d’un quartier classé ZUS
(Zone urbaine sensible, ndlr)
difficile, fragile, avec des conditions
socio-économiques pas toujours
favorables
», décrit la directrice.
Pourtant la demande affluait de
la part des femmes du quartier.
«
Au départ, c’était une rencontre
autour d’un thé à la menthe, afin de
prendre en compte leurs demandes.
Ça a commencé avec deux ou trois
personnes…
»
Petit à petit, les missions de
la Maison des Femmes se sont
diversifiées. Il existe un pôle
médiation, où un avocat et
un écrivain public viennent en
soutien des familles et les accom-
pagnent dans leurs démarches
administratives. En parallèle, des
ateliers cuisine ou couture sont
organisés. «
Ils sont bien fréquentés
et permettent à un certain profil de
femmes de leur fournir un tremplin
afin de leur donner envie de faire
quelque chose
», poursuit Zakia
Mzili-Couderc. Aujourd’hui,
quatre formatrices, une animatrice
et une douzaine de bénévoles
dispensent les cours.
À la carte
Désormais, l’un des objectifs de la
Maison des Femmes est d’insérer
professionnellement son public.
«
Nos formations ont tendance à
être de plus en plus modulables et
cg
92/
olivier
ravoire