mars-avril 2014 - n°34
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olivier
ravoire
e théâtre des Amandiers
n’est pas vraiment une
découverte pour Philippe
Quesne :
« Mon père, Jean-
Michel, travaillait dans la
compagnie d’Alain Enjary et Arlette Bonnard,
souvent invitée à l’époque de Pierre Debauche.
J’assistais aux répétitions dans les fauteuils de
la grande salle »
. À quarante-trois ans, le voilà
de retour à Nanterre avec la responsabilité
de diriger le plus gros centre dramatique
national et, accessoirement, l’un des plus
prestigieux comme en témoigne la liste de
ses prédécesseurs : Patrice Chéreau, Jean-
Pierre Vincent et Jean-Louis Martinelli.
A-t-il seulement le trac ?
« Quand j’ai appris
que notre projet avait été retenu, j’ai été fon-
damentalement heureux »
, avoue-t-il. Et
d’ajouter avec un enthousiasme sensible :
« Depuis, je dirais que nous sommes même
entrés dans une phase d’exaltation »
. Si Phi-
lippe Quesne dit « nous », c’est qu’il par-
tage, selon les termes du projet choisi par
le ministère de la Culture, la direction du
théâtre avec Nathalie Vimeux, jusqu’alors
directrice de l’Office national de diffusion
artistique. Aux yeux du jeune codirec-
teur,
« cette responsabilité partagée »
est
« fon-
damentale ». « Nous allons jouer sur la complé-
mentarité de nos profils. Elle a une expérience
sur le terrain administratif que je n’ai pas et
une ouverture très forte à l’international sur
d’autres réseaux de création contemporaine,
notamment en Europe de l’Est »
.
Formé aux arts graphiques à l’école
Estienne puis en arts plastiques à l’École
nationale supérieure des Arts décoratifs,
Philippe Quesne a d’abord réalisé pen-
dant plus de dix ans des scénographies de
théâtre, d’opéras ou encore d’expositions
d’art contemporain avant de créer sa propre
compagnie.
« Vivarium Studio
, raconte-t-il,
est né d’une ambition partagée par pas mal
d’artistes de ma génération : constituer un
répertoire avec un groupe d’acteurs, de dan-
seurs, de plasticiens, de musiciens, tout à la
fois fidèles et libres, et maintenir ce répertoire
continuellement en vie »
. Entouré d’une
« constellation »
d’artistes, il signe des spec-
tacles souvent cocasses mélangeant le natu-
rel au fantastique. Ses créations mettent en
scène de petites cérémonies, en apparence
dérisoires mais symptomatiques des travers
de notre société. Ainsi de
La Mélancolie des
dragons
, une pièce qui a joué
« un rôle impor-
tant dans la vie de la compagnie »
, qu’il envi-
sage de reprendre à Nanterre la saison pro-
chaine, ou encore
Swamp Club
, la dernière
en date, découverte cet été en Avignon, et
actuellement sur les routes d’Europe.
Dans les Hauts-de-Seine, Philippe Quesne
avait déjà été invité par Pascal Rambert,
le directeur du théâtre de Gennevilliers, à
composer la programmation du festival
TJCC (Très Jeune Création Contemporaine)
en 2012 avant de revenir la saison sui-
vante comme artiste associé du T2G.
« Le
projet que nous avons défendu n’a jamais été
porté par une volonté de rupture avec le passé,
insiste-t-il.
Nous arrivons Nathalie et moi avec
un réseau de jeunes artistes qui nécessairement
vont générer un flux de nouveaux spectateurs.
Nous allons toucher d’autres gens – comment
pourrait-il en être autrement ? - mais nous
avons aussi la volonté de fidéliser le public
actuel – que nous découvrons notamment par
le biais d’abonnés et de passionnés »
. Alors, à
quoi pourrait ressembler les Amandiers de
l’ère Quesne-Vimeux ?
« Nous voulons, par
exemple, rendre à la salle de cinéma voulue
par Chéreau, qui actuellement sert de lieu de
construction aux décors, sa vocation première.
Une ambition qui rencontre le souhait de
beaucoup de créateurs “hybrides“ actuels. Nous
allons aussi renforcer nos liens avec le Festival
d’Automne. Mais, plus que tout, nous voulons
travailler en réseau au niveau local. Nous pen-
sons pouvoir mettre en place des coproductions
avec d’autres plateaux des Hauts-de-Seine,
nous réfléchissons à des échanges possibles, à
des prolongements de tournées. Nous avons
la chance d’être implantés sur un territoire
passionnant, extrêmement vivant sur le plan
culturel »
.
n
Marie-Emmanuelle Galfré
L
Depuis le début du mois de janvier, il codirige avec
Nathalie Vimeux le théâtre Nanterre-Amandiers,
le lieu De ses premières expériences théâtrales…
“
“
Je venais de fêter
les dix ans d’exis-
tence de ma compa-
gnie, Vivarium Stu-
dio. Le nomadisme
a été passionnant
mais j’avais le désir
de me poser, de
rechercher la fidé-
lité d’un public, de
passer un cap artis-
tique. J’ai toujours
aussi eu le souci de
m’investir dans
le soutien à de
jeunes compagnies,
de faire bénéficier
des artistes émer-
gents de l’apport
d’un réseau, d’un
lieu, de moyens
techniques.