c u l t u r e
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HDS
mag
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n°39 - janvier-février 2015
au royaume ermite
Voyage
Sèvres-Cité de
la céramique présente
Corée Mania,
une exposition en deux
volets, qui commence
le 21 janvier avec
Roman d’un voyageur
:
la découverte d’un pays
encore secret à la fin
du XIX
e
…
Le secret du céladon
Objets de luxe et de prestige, les « grès verts » furent
convoités à la cour des princes dès leur apparition en Europe
au XIV
e
siècle. On leur prêtait la vertu magique de changer de
couleur en présence de poison ! C’est en France qu’ils seront
baptisés « Céladon », du nom du héros de
L’Astrée
, pièce dans
laquelle Honoré d’Urfé décrit un jeune berger portant des
rubans vert bleuté…
n
L
e voyageur en ques-
tion n’est autre que le
premier consul de
France en Corée, Vic-
tor Collin de Plancy.
« Le pays du
matin frais »
(selon la traduction
de Paul Morand) est alors devenu
une destination à découvrir, l’en-
gouement pour l’Asie étant à son
comble en Europe. Le mystérieux
« royaume ermite » vit les der-
nières heures de la dynastie Cho-
son (1392-1895). Jusqu’en 1890, le
diplomate collecte quelque 260
pièces de céramique coréenne
qu’il expédie au Musée national
de céramique de Sèvres et au
Musée Guimet. Son second séjour
coréen date de 1896- 1906
.
Corée Mania
déroule ainsi le
roman de la céramique coréenne,
Vincent Dupont-Rougier le met
en scène en contextualisant ses
pièces phares : quelques-unes,
inédites, datant de l’époque des
Trois Royaumes, du Royaume de
Silla Unifié (668-935) ou du XVIII
e
siècle (
Jarre à décor de dragon,
de
provenance royale). Le raffinement
de l’époque Kôryô (918-1392) se lit
© D.R.
à travers deux précieux bols, fin
XII
e
, en grès céladon à décor incisé
de motifs, de perroquets pour l’un,
de pivoines pour l’autre, et portant
la plus belle des teintes de céladon.
Une technique complexe. «
Ce sont
les potiers chinois qui au III
e
siècle
de notre ère inventent des grès à la
couverte vert foncé,
explique Sté-
phanie Brouillet, commissaire de
l’exposition.
Sous la dynastie Song
(960-1279), selon la géographie des
sites, les céladons sont de couleur
vert olive ou de couleur pâle tirant
vers le bleu. Les potiers coréens ne
les mettront au point qu’au X
e
siècle
mais ils portent cet art à un niveau
inégalé jusqu’au XII
e
en inventant
la décoration incrustée sous une cou-
verte translucide »
. Au XIX
e
siècle,
les potiers de la manufacture de
Sèvres tenteront en vain de percer
le secret du céladon vert bleuté,
le laboratoire poursuit d’ailleurs
toujours la recherche de ce que
les coréens nomment
Féi-tsoui
…
couleur de martin pêcheur !
n
Alix Saint-Martin
Jusqu’au 20 juillet.
© RMN - RMN-G
rand
P
alais
(S
èvres
,
C
ité
de
la
céramique
) M
artine
BECK COPPOLA
Après le volet patrimonial, suivra une exposition résolument contemporaine.
Boll du XII
e
siècle, Corée. Grès, couverte céladon.