HDS.mag n°39 - page 45

janvier-février 2015 - n°39
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Le royaume de France pouvait-il devenir protestant ? La question est au cœur du livre d’
Hugues Daussy,
prix Chateaubriand 2014
pour son ouvrage sur le parti huguenot avant la Saint-Barthélemy.
Rendez-vous à l’Institut de France
Créé par le conseil général en 1987, le prix Chateaubriand récom-
pense chaque année une œuvre de recherche historique ou
d’histoire littéraire en lien avec les centres d’intérêt de l’écrivain
romantique. Le prix, doté de 15 000 euros, a été attribué le 19
novembre dernier par le jury réuni à laMaison de Chateaubriand,
à Châtenay-Malabry. Il sera remis à Hugues Daussy le jeudi 22
janvier à 18 heures à l’Institut de France, quai de Conti à Paris. La
cérémonie sera suivie d’une conférence du lauréat. Entrée libre.
Réservation obligatoire au 01 55 52 13 00.
n
Pourquoi avoir choisi de
consacrer vos recherches
au parti huguenot et
spécifiquement à la période
allant de 1557 à 1572 ?
J’avais consacré ma thèse à Phi-
lippe Duplessis-Mornay, l’un des
chefs du parti huguenot dans la
période chronologique ultérieure.
J’ai eu envie de remonter dans
le temps pour étudier les débuts
de cette organisation politique et
militaire. L’année 1557 correspond
au début de la politisation de la
Réforme française : c’est à partir
de cette date que le mouvement
réformé français, qui avait jusque-
là uniquement une dimension
religieuse, acquiert progressive-
ment une dimension politique :
alors que les réformés français
pensaient convertir le royaume au
protestantisme, ce processus de
conquête a échoué. La désillusion
devient définitive avec le massacre
de la Saint-Barthélemy en 1572 et
l’assassinat des principaux chefs
politiques de la Réforme française.
Quels éléments
pouvaient donner
l’espoir aux réformés de
convertir le royaume au
protestantisme ?
Ils sont aveuglés par une foi
intense et intimement convain-
cus qu’ils défendent la « vraie reli-
gion ». Pour eux, la lumière de la
vérité va briller avec une telle vio-
lence qu’elle va finir par entraîner
la conversion du roi. Il y a donc
une certaine utopie jusqu’à ce
qu’on se rende compte qu’il faudra
des moyens humains pour aider
le roi à percevoir cette lumière.
On imagine aussi que Catherine
de Médicis, la femme d’Henri II,
roi en 1557 – avait des sympathies
naturelles pour la Réforme. Pen-
dant longtemps, elle a du taire ces
sympathies mais après la mort de
son mari, elle aurait pu à nouveau
se laisser tenter par cette voie…
Cette quête s’articule
autour d’un solide réseau…
Le processus est initié par Calvin
depuis Genève, qui a formé des
pasteurs pendant des années.
Parmi eux, certains sont envoyés
auprès de la noblesse française afin
de la convertir. Cette campagne de
conversion cible des personnages
bien précis en raison de leur impor-
tance sociale. C’est le cas du prince
Louis de Condé, deuxième prince
du sang, qui va devenir l’un des
chefs du parti huguenot.
Quels événements vont
définitivement faire
perdre leurs illusions aux
protestants ?
Il y a une première phase relati-
vement pacifique qui précède les
guerres de religion. Des tentatives
sont conduites par la monarchie
pour trouver un terrain d’entente
entre les catholiques et les pro-
testants et mettre un terme au
schisme : c’est un échec. On pro-
mulgue l’édit de Janvier dans lequel
la liberté de culte et de conscience
est accordée aux réformés fran-
çais. Mais cette liberté est limitée.
Puis, dans une seconde phase, on
entre dans la première guerre de
religion au terme de laquelle est
signé, en 1563, un nouvel édit qui
est moins favorable aux réformés
que le précédent. Puis deux autres
guerres civiles se déclenchent qui
ne font qu’accentuer la conviction
que la seule voie qui peut s’ouvrir
est celle de la coexistence des deux
religions. Enfin, la Saint-Barthé-
lemy vient anéantir complètement
ces espoirs : la relation de confiance
avec Charles IX, qui a donné l’ordre
de tuer les chefs huguenots, est
rompue.
Après 1572, que va devenir
le parti huguenot ?
Il ne meurt pas avec la Saint-Bar-
thélemy : il renaît avec un perfec-
tionnement constant de son organi-
sation et de sa puissance. L’objectif
n’est plus la victoire finale mais la
résistance pour obtenir la coexis-
tence et un statut légal.
n
Propos recueillis par
Mélanie Le Beller
Le parti huguenot. Chronique
d’une désillusion (1557-1572).
éd i t i on
L’illusion
d’une France
huguenote
a duré quinze ans
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Revivez la proclamation du Prix
Chateaubriand en vidéo sur
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