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n°29 - mai-juin 2013
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Le Nôtre
Sceaux est une
HDS
Qui était André
Le Nôtre ?
PAL : André Le Nôtre naît en
1613 à Paris. Il est le fils et le
petit-fils de jardiniers des Tui-
leries. Son père est le jardinier
de Louis XIII. À cette époque,
pour les métiers « artistiques ou
techniques » – peinture, archi-
tecture, ébénisterie, jardinage
–
le système hérité du Moyen Âge
est corporatiste voire familial.
On ne cherche pas à diffuser
le savoir-faire à l’extérieur mais
bien au contraire à protéger le
métier. André Le Nôtre va donc
devenir naturellement jardinier.
Il sera celui de Louis XIV.
HDS
Le Nôtre est le grand
représentant des jardins à
la française. Mais il n’en est
pas l’inventeur…
PAL : Non. Le jardin à la fran-
çaise apparaît à la fin du XVI
e
siècle à la suite des guerres
d’Italie. Il dérive du modèle ita-
lien. C’est une gravure d’Étienne
Dupérac, architecte d’Henri IV,
représentant la villa d’Este à
Tivoli, qui va inspirer toute une
série de jardins en France. À
commencer par celui de Saint-
Germain imaginé par Dupérac
lui-même.
HDS
Quels sont les principes
du jardin à la française ?
PAL : Tout d’abord la symétrie.
Tout est composé autour d’un axe
et le paysage est le même à droite
et à gauche. C’est un principe de
perfection inspiré de la création
divine et du corps humain. Le
deuxième principe, c’est l’étage-
ment en terrasses. Les parterres
sont conçus pour être vus depuis
le rez-de-chaussée surélevé ou le
premier étage du château, comme
des tapis décoratifs déroulés sous
les fenêtres. En découle un autre
principe, ce que Voltaire appelait
«
du peigné au sauvage
». Plus on
est près du château, plus les végé-
taux sont bas et taillés avec des
formes architecturées. Plus on
s’éloigne, plus les masses végétales
montent et sont traitées naturel-
lement. D’autres principes sont
importants comme l’utilisation
de l’eau sous différentes formes :
bassins, cascades… et la place du
décor : statues, marbres dans les
fontaines… Le jardin à la française
repose donc sur une attitude très
interventionniste. C’est l’image
de l’homme qui commande à la
nature pour introduire de l’har-
monie dans un paysage a priori
désordonné, voire chaotique.
HDS
Qu’est-ce que Le Nôtre
a apporté à ces jardins ?
PAL : L’intelligence du travail de Le
Nôtre est de pouvoir s’adapter à la
morphologie du terrain, à l’évolu-
tion des emprises foncières. Saint-
Germain, Versailles, Saint-Cloud,
Vaux-le-Vicomte, Sceaux, Meu-
don…, tous les jardins de Le Nôtre
respectent les grands principes
que je viens d’énumérer mais
sont différents. L’apport majeur
d’André Le Nôtre est ce que l’on
appelle la conquête de l’horizon.
Avant lui, le jardin est une com-
position restreinte enfermée dans
des murs. Les compositions de Le
Nôtre donnent au contraire l’im-
pression de s’étendre à l’ensemble
du territoire avec, toujours comme
point de départ, le château. Sceaux
illustre parfaitement ce principe.
HDS
Quelles sont les particu-
larités de Sceaux ?
PAL : Le jardin de Sceaux est une
des œuvres majeures d’André Le
Nôtre. Ce qui est original ici, c’est
œuvre majeure
Architecte en chef des Monuments historiques,
Pierre-André Lablaude
dirige la restauration des broderies du domaine de Sceaux. Un chantier
réalisé à l’occasion du 400
e
anniversaire de Le Nôtre.
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