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n°42 - juillet-août 2015
juillet-août 2015 - n°42
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C
o m m a n d e
p u b l i q u e
de l’État à Jean
D u b u f f e t ,
La Tour aux
Figures
a été inaugurée en 1988,
inscrite aux Monuments histo-
riques en 1992, puis classée en
2008. Visitable à l’origine, la
Tour était fermée depuis une
dizaine d’années au vu de son
état. En devenant son proprié-
taire, le Département entend
pa t r imo i ne
d’abord assurer son sauvetage.
Le programme de restauration
de la
Tour aux Figures
prévoit
ainsi la restauration et la remise
en peinture de l’épiderme exté-
rieur pour une restitution
des couleurs d’origine, en étroite
collaboration avec la Fondation
Dubuffet. L’étanchéité et le revê-
tement du sol, la révision tech-
nique de l’intérieur de la Tour, la
réfection de l’éclairage extérieur
pour une mise en lumière noc-
turne,
l’aménagement
des
abords paysagers sont au pro-
gramme ainsi que l’organisation
de la maintenance ultérieure de
l’œuvre. Le calendrier de ce pro-
jet de restauration est en cours
de constitution. Il devra tenir
compte du statut de l’œuvre,
notamment son classement au
titre des Monuments histo-
riques, qui implique une
approche et des précautions spé-
cifiques. Le résultat desétudes
préalables qui vont être menées
- diagnostics sur l’état intérieur
et extérieur de la
Tour aux
Figures
, études de faisabilité
technique… - sera déterminant.
«
La Fondation Dubuffet sera
toujours présente sur ce dossier et
demeure garante du droit moral
de l’œuvre, à la fois observateur,
conseil, défenseur de l’authenticité
et de la volonté de l’artiste
», pré-
cise Sophie Webel, directrice de
la Fondation. «
C’est une œuvre
une vigie pour la Vallée
de la Culture des Hauts-de-Seine
La Tour
aux Figures
Désormais propriétaire de l’œuvre,
le Département s’apprête à rénover
cette sculpture monumentale de Jean Dubuffet
érigée dans le parc
de l’Île Saint-Germain, à Issy.
la date du classement de la sculpture
aux Monuments historiques où elle
avait été inscrite dès 1992
2008
mètres : la hauteur de l’édifice
(pour 12 mètres de largeur).
Son ossature est en béton armé
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l’intérieur de la tour est un
labyrinthe ascensionnel de plusieurs
étages baptisé « le Gastrolove »
Gastrolove
commencée avant la mort de
Dubuffet, la tour sera achevée
suivant les dessins de l’artiste
Posthume
Questions à Christian Dupuy,
vice-président du conseil départemental chargé
de la culture.
Quel est l’enjeu de la
dévolution de la Tour aux
Figures de l’État au conseil
départemental ?
Depu i s 1988 , c e t t e œuv r e
majeure de Jean Dubuffet est
implantée au sein du parc
départemental de l’Île Saint-
Germain, à l’emplacement choisi
par l’artiste. Chaque jour, elle
est côtoyée par des centaines
de visiteurs, et notamment
des familles. Mais peu à peu,
l’État n’ayant pas les moyens de
l’entretenir, elle s’est dégradée :
s e s cou l eur s son t t e rn i e s ,
l’étanchéité n’est plus assurée,
elle n’est plus éclairée… Non
seulement elle n’est pas valorisée
auprès du public, mais ces altéra-
tions risquent de nuire irrémé-
diablement à sa pérennité. C’est
pourquoi Patrick Devedjian a
proposé à l’État d’en assurer la
sauvegarde en contrepartie d’un
transfert de propriété.
Emblématique de l’art contem-
porain, l’œuvre est un symbole
fort pour le Département dont
elle marque l’entrée sur le terri-
toire, l’entrée de la Vallée de la
culture.
Quelle est l’ampleur de la
rénovation envisagée ?
À hauteur de quel budget?
Pour être menée dans les règles
de l’art, la restauration se fera en
concertation étroite notamment
avec la Fondation Dubuffet qui
détient les droits moraux de
l’artiste, de façon à respecter son
intégrité matérielle et son esprit.
Le Département a inscrit un
budget de l’ordre de 1 M
€
pour
les travaux de réhabilitation.
C’est beaucoup, mais avec cette
cession, c’est une œuvre estimée
à 6,5M
€
qui entre dans le patri-
moine départemental !
Un symbole
fort
pour
le département
importante, un des tous premiers
projets de Dubuffet, commencé
en 1966. Le projet a été agrandi
par étapes. Dubuffet commence
à le montrer en 1968, lors de la
grande exposition intitulée Édi-
fices, projets et maquettes d’archi-
tecture, au musée des Arts Déco-
ratifs de Paris, la sculpture monu-
mentale faisant la couverture du
catalogue. Elle est aussi présente
parmi les grandes photos-montages
où, par provocation, Dubuffet met
ses sculptures en situation dans
la ville de Paris ! Le projet de la
Tour aux Figures
lui tenait à cœur
et, dès le départ, il l’envisageait
comme visitable
»…
De la sculpture à l’architecture
Avec La
Tour aux Figures
et
Le Cabinet logologique
de la Villa
Falbala, Dubuffet a inventé
un «
jargon illustré
», fabriqué
des lieux et livré dans un défer-
lement plastique une foule de
personnages loufoques comme
autant d’autoportraits. Pam-
phlétaire, autodidacte, Dubuf-
fet est l’initiateur de l’Art
brut, un terme qui désigne
des productions de personnes
exemptes de culture artistique
dont il constitue en 1976,
à Lausanne, une collection au
retentissement international.
Il expose alors auxÉtats-Unis
(MoMA, Guggenheim) où son
œuvre est perçue comme
un «
paysage mental
». Inclas-
sable, fascinante, La
Tour
aux Figures
est l’aboutissement
de l’œuvre de Jean Dubuffet :
en 1985, quelques mois avant
sa mort, l’artiste choisit «
au pas
de course
» le futur emplace-
ment de la sculpture monu-
mentale à Issy-les-Moulineaux.
La peau de l’œuvre est «
histo-
riée de graphismes traduisant les
cheminements rêveurs de la pen-
sée…
» et ses entrailles, le « Gas-
trovolve », engagent le visiteur
à l’étrangeté d’un voyage… qui
sera à nouveau rendu possible
après rénovation.
n
Alix Saint-Martin
CD92/O
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R
avoire
© CD92/J
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